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Autriche : le chef d’établissement, un management scolaire au service de la qualité

Publié le 28 août 2023

En introduction au colloque international Enjeux et défis du leadership pédagogique et scolaire au XXIe siècle, l’IH2EF vous propose des présentations du contexte scolaire dans une douzaine de pays, essentiellement européens. Rédigées par Romuald Normand, professeur à l’université de Strasbourg et directeur scientifique de ce colloque, ces présentations permettent de saisir les différents contextes et enjeux scolaires qui seront évoqués par les intervenants.

Pendant longtemps, le système éducatif en Autriche s’est caractérisé par son organisation bureaucratique et hiérarchique. Mais à la lumière des faibles résultats du pays dans les comparaisons internationales de résultats (en particulier PISA et TIMSS), l’éducation a subi de profonds changements. Une nouvelle structure de gouvernance a été introduite, comprenant des normes de performance, des évaluations nationales, un management de la qualité et la publication régulière de rapports nationaux sur l'éducation.

Dans l'ensemble, ces réformes montrent une évolution du système éducatif vers une gestion par les résultats, avec une responsabilisation accrue et une plus grande autonomie des établissements scolaires et des écoles.

Malgré ces changements et contrairement à d’autres pays, cette pression à la performance comme l’autonomie demeurent limitées, notamment dans les marges de manœuvre des directions scolaires sur le plan budgétaire ou encore l’adaptation des programmes nationaux. Pendant longtemps, le chef d’établissement ou directeur d’école - comme en Allemagne - a été considéré comme un "primus inter pares", c’est-à-dire un enseignant avec des fonctions administratives.

En Autriche, ces changements dans la direction scolaire sont allés de pair avec "une nouvelle culture de l'évaluation". Elle a progressivement établi le chef d’établissement ou le directeur d’école dans un positionnement stratégique sur le plan pédagogique et plus seulement administratif.

En conséquence, les tâches de direction concernent désormais le management de la qualité, l’auto-évaluation, le développement de l'organisation pédagogique, de l'enseignement et du personnel, ainsi que les relations avec l’extérieur. En même temps, le chef d’établissement ou le directeur d’école est responsable de la mise en œuvre cohérente des lois et des réglementations, du contrôle de la qualité et de la supervision du travail pédagogique.
En conséquence les résultats des apprentissages des élèves sont mesurés en termes de compétences. Des tableaux de qualité doivent en outre mettre en évidence la qualité des processus mis en œuvre par la communauté éducative. Avec l’auto-évaluation, le corps d’inspection s’occupe moins de l’interprétation et du contrôle des règles. Il s’investit dans des démarches d’audit-qualité des établissements et des écoles, mais aussi de développement professionnel des équipes pédagogiques.

L’équipe de direction doit motiver, coordonner et soutenir les enseignants dans la prise en compte des objectifs, l'interprétation des données et les actions de développement professionnel liées à l'enseignement, afin qu’ils soient orientés vers les objectifs fixés et les résultats des élèves.

Les équipes de direction, au-delà de la mise en œuvre des réformes, doivent eux-mêmes adopter un comportement fondé sur des preuves, c'est-à-dire collecter des informations ou les rechercher par elles-mêmes à partir de l’évaluation/auto-évaluation et l’observation de leur environnement. Elles ont à interpréter ces informations en lien avec les processus mis en œuvre, tout en prenant et justifiant leurs décisions à partir d’objectifs ciblés, mais aussi en motivant les enseignants à agir de la même façon. Les enseignants, de leur côté doivent suivre des formations pour améliorer la qualité et renforcer la dynamique partenariale, notamment avec les parents d’élèves.
Jusqu'à la révision des programmes de qualification en 2018/2019, la formation des chefs d'établissement autrichiens était rudimentaire. Les critères de sélection se faisaient selon l’ancienneté (au moins six ans d'expérience dans l'enseignement), un bon dossier et une intégrité sociale. Dans les quatre ans suivant leur nomination, les candidats devaient suivre une formation continue en gestion scolaire avec une charge de travail équivalente à 12 crédits ECTS (European Credit Transfer System). En fait, la structure d'âge des équipes de direction constitue une difficulté particulière pour le système scolaire autrichien. En 2012, le rapport national sur l'éducation a fait état d'un "vieillissement excessif". Si de nouveaux recrutements ont été assurés depuis, les chefs d’établissement ou directeurs d’école novices sont souvent confrontés à un certain nombre de défis pour s'adapter à leur poste. Ces éléments contextuels tendent à limiter la mise en œuvre d’un leadership pédagogique au-delà du management de la qualité.


Source : Altrichter, H., Kemethofer, D. & George, A.C. Schulleitungen und evidenzbasierte Bildungsreform im Schulwesen. Z f Bildungsforsch 9, 17–35 (2019).