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Le système éducatif et la laïcité en Italie

Publié le 23 septembre 2022

picto entretien Quelles sont les spécificités des relations entre l'État et les cultes, entre l'École et les cultes, en Italie ? Voici un bref entretien rédigé par les auditeurs du cycle annuel 2021-2022.

pictogramme quizz entretien Entretien flash

4 questions à Maria Chiara Giorda,
Professeure des universités en histoire des religions, l'Università degli Studi Roma Tre - université de Rome III (Rome, Italie).

 

picto dialogue Y a-t-il une séparation des églises et de l’État en Italie ?

La constitution de 1948 définit dans ses articles 7 et 8, les relations que l’État italien entretient avec les organisations religieuses. L’article 7 est consacré à l’église. L’église catholique n’est pas une religion d’état, mais une religion privilégiée. L’article 8 concerne les autres religions ayant une personnalité juridique. La laïcité n’est pas inscrite dans la constitution italienne. En 1984 le concordat est révisé. En 1989, le principe de laïcité est évoqué dans la décision de la Cour Constitutionnelle italienne n° 203 du 12 avril 1989.

Du point de vue scolaire, le système de l’école italienne est basé sur l’école publique et concerne 80 % à 85 % des élèves. L’école privée est confessionnelle, majoritairement catholique, avec quelques écoles vaudoises ou juives. Ce sont les communautés religieuses qui les financent. Une partie est réalisée par le "8 pour 1 000" (taxe). Il y a seulement deux écoles musulmanes pour tout le pays, financées par l’Égypte pour l’une et le Maroc pour l’autre.

L’enseignement de la religion catholique continue à être dispensé dans les écoles, mais n’est plus obligatoire. D’autres alternatives sont alors laissées à la libre appréciation des établissements : enseignement alternatif sur des thèmes liés à l’éthique, aux valeurs, à la tolérance, à la paix, mais aussi des séances d’étude supervisées ou en autonomie, ainsi que la possibilité laissée aux élèves d’arriver plus tard ou de sortir en avance des établissements.

picto dialogue L’État italien est-il neutre vis-à-vis des religions ? Comment s’exerce cette neutralité ?

Des accords entre l’État italien et les cultes disposant d’une personnalité juridique ont été formalisés. Même si on ne parle pas de religion d’état, la religion catholique reste la plus importante. Elle est privilégiée.  

Ainsi le crucifix est toujours présent dans les classes. Ce n’est que lorsque quelqu’un demande son retrait que s’ouvre le débat sur les symboles religieux. La question de la nourriture est également très importante pour tester la diversité à l’école puisque de plus en plus de d’élèves mangent des menus alternatifs basés sur des croyances religieuses.

Les minorités religieuses sont de plus en plus nombreuses et diversifiées. Pourtant, alors qu’avec le concordat l’enseignement religieux ne peut être réalisé que par des enseignants ayant suivi un enseignement théologique catholique, les autres religions doivent payer pour leur enseignement.  

La frontière est poreuse entre la société et la religion. En effet, la majorité religieuse est aussi une majorité culturelle et politique.

picto dialogue Comment s’articulent liberté de conscience et de religion en Italie ?

Le principe de laïcité n’est pas inscrit dans la constitution italienne. Il est cependant reconnu depuis la décision de la Cour Constitutionnelle italienne n° 203 du 12 avril 1989.

L’histoire des religions n’existe pas à l’école. Seul est proposé un enseignement de la religion catholique (d’une durée de deux heures hebdomadaires) qui n’est plus obligatoire depuis 1984, ou une alternative :

  • activité laissée à la discrétion de chaque établissement sur des thèmes liés à l’éthique, aux valeurs, à la tolérance, à la paix ;
  • séances d’étude supervisée ou en autonomie ;
  • possibilité pour les élèves d’arriver plus tard ou de sortir en avance.

picto dialogue Comment se pose la question de l’égalité morale des citoyens, quelles que soient leurs conceptions de la vie bonne ?

Les autorités italiennes refusent ou sont dans l’incapacité de proposer et d’harmoniser une offre alternative pour gérer la pluralité religieuse. Il existe une tension entre un immobilisme concernant la place de la religion catholique et la prise en compte d’une diversité religieuse croissante que l’on pourrait qualifier de "super-diversité".

Malgré des cours d’enseignement de religion catholique et une volonté de prendre en compte la diversité religieuse au sein de la société italienne, on constate une ignorance sur les faits religieux, de la part des élèves comme des enseignants, que l’on pourrait désigner par le terme “analphabétisme religieux”. Une perspective est à envisager : celle de réfléchir dans un cadre européen à un contenu d’enseignement des faits religieux pour aider à la connaissance et pour lutter contre l’ignorance.

L'Italie doit relever le défi de la transformation du monopole catholique vers une diversité religieuse.

 

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